Pendant ces temps difficiles, on a tous des réflexions sur nos choix de vie.
J’étais curieuse d’aller à la rencontre de différents nomades pour apprendre et partager leurs réflexions de nomade, si utiles en ce moment. Je vous ma conversation avec Julie Plante, une entrepreneure qui vit et travaille à même sa van. Notre échange a eu un impact sur ma façon de voir les choses et qui, je l’espère, aura le même impact sur vous. Selon elle, apprendre à vivre au jour le jour et renouer avec notre créativité, c’est la clé.
Raconte-moi un peu ton histoire.
Avant, j’étais une fille qui faisait du 9@5. J’habitais dans un condo sur la Rive-Sud de Montréal. Quand je voyageais, je le faisais en tout inclus. J’ai travaillé pour LOLE en tant que responsable des ambassadrices. Je devais recruter des femmes qui correspondaient à la clientèle. J’ai rencontré des femmes super inspirantes. Elles sont allées au bout de leurs rêves, leurs ambitions.
Je travaillais comme une malade. 80h par semaine. J’ai poussé la machine un peu trop au bout et j’ai fait un burnout.
Mon corps me parlait. J’avais des changements à faire. Ce que LOLE signifie c’est «Live Out Loud Everyday». À ce moment je ne vivais pas du tout «out loud everyday». Je me suis dit, pourquoi pas moi aussi aller au bout de mes ambitions ?
J’ai réalisé qu’il faut se faire confiance dans la vie. Depuis que je suis toute petite, je voulais être maquilleuse, mais mes parents ne voulaient pas. On m’a dit que ce n’était pas un vrai métier, que je devais faire des études universitaires. C’est pourquoi je me suis défoncée dans les études dans quelque chose que je n’aimais pas tant. C’est peut-être de là que provient mon burnout. À force de faire quelque chose que tu n’aimes pas tant, tu t’éteins.
Ce jour-là, j’ai décidé de tout lâcher et de partir à mon compte. D’aller au bout de mes ambitions à moi, comme ces femmes.
Mes parents sont très conventionnels. Ils avaient beaucoup d’objections par rapport à mes projets. Je les déstabilisais. Ils m’ont tout de même prêté de l’argent pour que je puisse commencer mon entreprise.
Ma force c’est de voir les tendances. Les tendances, ça vient des mouvements de société. Il y avait un phénomène au niveau des ongles, c’était devenu un accessoire. J’ai pris un cours de pose d’ongle. Quatre semaines, seulement. Mon objectif était de rentrer dans un salon de coiffure et de pouvoir observer.
J’ai écrit à la maquilleuse chez LOLE à plusieurs reprises. Elle me disait non au début, mais j’ai persévéré. Un an après, elle m’a prise sous son aile. C’est une top maquilleuse à Montréal. Elle m’a représenté dans son agence et c’est à partir de là que mon entreprise a décollé. C’était rendu du bouche à oreille.
Déjà là, je faisais tellement plus d’argent. En mode, tu peux gagner maximum 20-25$/h. Le taux horaire d’une maquilleuse, c’est minimum 45$/ h. Bien sûr, il n’y a pas de garantie d’avoir une paie. Mais quand tu aimes ça, les contrats ne sont pas très difficiles à trouver.
Puis, il y a eu ma transition vers la vie de van.
Après cinq ans, je me suis mise à faire du kite surf et ça demandait beaucoup de déplacements. J’ai découvert la van life à travers le kite car c’était populaire dans la communauté. La quête du vent demande beaucoup de déplacements. Je n’étais jamais chez nous. Soit j’étais partie faire mes contrats, soit faire du sport. Je commençais à avoir ce goût pour de me déplacer davantage. Je ne me sentais pas chez nous.
Je me suis ne dit: pourquoi pas créer un beauty truck ? Il y avait des fashion trucks, des food trucks, mais pas de beauty truck. C’est là que j’ai tout vendu mes possessions. J’ai acheté une van et je l’ai transformée en ma business et ma maison en même temps. La transition au niveau de van life s’est bien faite. La vie de van, c’est tellement extraordinaire.
Où vis-tu en ce moment, pendant la crise du COVID-19?
J’ai loué un chalet dans la montagne à Sutton pour l’hiver. Quand je suis revenue de mon road trip en Amérique centrale, j’avais besoin de me «grounder» un peu. Avec tout ce qui se passe, ça tombe tellement bien.
Mon plan était de revenir dans la van à temps plein en mai et de continuer mes services beauté pendant l’été, mais les soins esthétiques risquent d’être les derniers à être accessibles à nouveau.
Quelles sont tes réalisations de crise ?
J’ai le meilleur mode de vie en temps de crise. Je peux faire la quarantaine où je veux. Dans ma van, je contrôle pas mal tout, incluant mon électricité. Je ne suis pas dépendante d’Hydro-Québec, contrairement à la majorité des gens aux Québec.
Avant, je me posais beaucoup de questions, j’aimais prévoir les choses. Mon road trip m’a beaucoup appris. Je me suis rendue compte que je ne peux pas savoir ce qui peut arriver. La preuve: la pandémie. C’est bien d’avoir des objectifs et prévoir dans la vie. Mais en même temps, c’est aussi bien de ne pas se poser de questions. En ce moment, se poser des questions ne mène à rien. On perd notre temps et notre énergie.
La seule chose que je contrôle, c’est aujourd’hui. Qu’est-ce que je peux faire aujourd’hui pour avoir l’impression d’avancer? Ne serait-ce qu’un pas en avant?
Vivre au jour le jour et lâcher prise. C’est ce que la vie de nomade m’a appris et ce que nous sommes forcés à apprendre en ce moment. Souvent on essaie de prévoir, pour se protéger de l’inconnu. Avant de partir en Amérique centrale, tout le monde me disait que c’était dangereux. On prévoit toujours le pire. Mais au fond, c’est tellement rare que le pire arrive. Vivre dans la peur n’est pas la solution. Il ne faut pas s’empêcher de faire des choses parce qu’on a peur.
Que fais-tu maintenant ?
Je ne fais plus de revenu avec mon beauty truck. Par contre, durant mon voyage, j’ai eu beaucoup d’inspiration pour la création de bijoux. J’ai parti ma collection d’accessoires. J’ai commencé ça pour le fun et déjà j’ai plein de commandes. J’ai une spécialisation en mode eco-friendly. J’essaie toujours de réutiliser. Less is more. Toute ma collection, c’est fait à la main et n’importe qui peut faire ça.
Je veux inspirer d’autres personnes à développer leur créativité et à l’utiliser, c’est mon objectif.
Souvent, quand on a perdu notre créativité, c’est qu’on est trop dans le rationnel et on a perdu notre intuition. C’est comme un sport, ça se pratique. La créativité, c’est seulement savoir trouver une solution à un problème.
Ma collection s’appelle Follow your heart. Quand tu parles avec ton cœur, quand tu suis ton cœur, tout se place. Tu peux mettre ta main sur ton cœur et écouter ce qu’il a à dire. La réponse va venir. Il faut juste prendre le temps.